8 septembre 2006
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Voici la suite du passionnant article de Dame Hermine sur les épices de l’époque médiévale…
Au Moyen-âge, ce sont les « Maistre queux » qui ont l’art de maîtriser les épices. Ils en mettent partout : mets salés ou sucrés, boissons… tous en contiennent. Le plus souvent elles sont ajoutées en fin de cuisson, après avoir été réduites en poudre placée dans un nouet (sachet de tissu) que l’on retire du plat avant de servir. Et sacrebleu… ! Ne faites jamais bouillir les épices, vous gâcheriez leur arôme. Elles ne sont pas éternelles et leur goût diminue avec le temps. Il faut les conserver dans un endroit sec, à l’abri de la lumière et dans des boîtes bien fermées.
Les cuisiniers médiévaux ont une véritable connaissance de l’utilisation des épices, de leur dosage et de leur association. Dans leurs recettes, ils mettent en pratique les conseils diététiques et les théories médicales que l’on trouve dans des ouvrages sur la santé (Regimen Sanitatis).
Chaque épice a une saveur particulière et des propriétés caractéristiques.
Le safran : C’est une variété particulière de crocus. Il faut 300 000 pistils de la fleur pour obtenir 500g de safran. Au MA, son prix est 12 fois celui du gingembre. Il est employé presque dans toutes les recettes, surtout parce qu’il colore en jaune les plats. Il a un goût âcre, amer et piquant, mais une bonne infusion de safran est recommandée avant et après les festins médiévaux.
La mythologie raconte que le dieu Hermès jouant au disque avec son ami Crocos le blessa mortellement au front. Son sang se répandit sur le sol et donna naissance à la fleur du Crocus Sativus.
Les poivres : Le poivre long (Piper Longum) domine la cuisine jusqu’au XIIe siècle puis il est remplacé peu à peu par le poivre rond (Piper Nigrum). Le poivre sert de monnaie d’échange : il vaut l’or de l’époque. Il est utilisé en assemblage avec le sel. Les poivres sont inodores, leurs goûts sont plus ou moins piquants et brûlants.
Le poivre de Guinée appelé maniguette ou graine de paradis remplace les vrais poivres qui sont hors de prix ou lors de pénurie.
Le gingembre : Ses racines s’utilisent fraîches, séchées, moulues, en poudre ou marinées. Elles s’associent bien avec la cannelle. D’un goût piquant, citronné et fruité, elles parfument à merveille les mets et les boissons. Tous les festins se terminent par du gingembre roulé dans du miel.
Le clou de girofle : C’est le bouton floral du giroflier. Une poignée vaut le prix d’un mouton et d’un demi bœuf ! Il est incontournable dans les boissons alcoolisées du MA. Son goût est très fort et brûle légèrement. Il sent très fort. Au MA on pique une orange de clous de girofle puis on fixe à sa ceinture cette « pomme d »ambre » pour combattre les mauvaises odeurs et les épidémies de peste.
La cardamome : Ses cosses renferment des graines que l’on réduit en poudre. Au MA c’est une des 3 épices les plus chères. Elle s’associe aussi bien au salé qu’au sucré : elle a un arôme délicat sucré et piquant. Elle laisse un arrière-goût qui ressemble au citron, à la bergamote.
La cannelle : C’est l’écorce séchée, en morceaux ou moulue qu’on utilise en faible quantité. Son arôme est puissant. C’est Marco Polo (1254 – 1324) qui la découvre et la ramène à Venise après 24 ans de voyage sur la Route de la Soie vers la Chine.
La muscade et le macis : La noix de muscade n’est pas le fruit du muscadier mais le noyau de son fruit. La pulpe du fruit et son enveloppe forment le macis dont la saveur est plus douce que celle de la noix : c’est l’épice reine aux yeux du cuisinier Taillevent. Attention la noix de muscade est classée comme toxique : une noix ingérée entièrement provoque des évanouissements qui peuvent être fatals.
En cuisine, le dosage des épices dépend principalement du goût, de l’expérience du cuisinier. Certaines épices s’associent à merveille : cannelle et gingembre, cannelle et muscade, cannelle et cardamome, coriandre et muscade, maniguette et macis, sauge et gingembre. Certaines épices peuvent se substituer à d’autres : galanga ou gingembre, macis ou muscade, poivre noir ou maniguette. Quant à la saveur du safran (du vrai !) elle se suffit bien souvent à elle-même.
A suivre…
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