Nous sommes en l’an de Grâce 1180, notre béjaune (jeune) Roi Philippe que l’on surnommera Auguste par son coraige (courage) a tout juste 15 ans, il pleure encore son père Louis le Septième que la Carnade (mort) a pris et qui par son divorce avec la belle Aliénor d’Aquitaine plongera le Royaume des Lys dans une Guerre de Cent Ans avec le Royaume des Léopards.
Mais nous n’en sommes pas encore là : pour le moment le gent (gentil) Philippe arborant Cotte D’Azur aux Lys d’Or (couleurs du Royaume) et Corone (couronne) en tête chevauche bellement et en grand bobant (grande pompe) un superbe destrier noir, hourdé (accompagné) par le Maréchal (Maistre de l’Ost ou Armée en campagne) portant l’Ecu du Roy en chantel (dessin visible) ainsi que plusieurs palfreniers et Lances(20 hommes) d’Archers et de Cranequiniers (Arbalétriers à cheval)
Il vient de Saint Denis (au septentrion), où il s’est entretenu secrètement avec les Mânes de ses ancêtres. Il pénètre donc dans sa Bonne Ville à la tête de son fendant barnage (Fiers Grands Seigneurs et Fières Grandes Dames) montant moults Palefrois (chevaux de parade) lesquels font ainsi acte d’allégeance et de fidélité à la Couronne.
Pour ce faire il passe la Porte Saint Martin, laissant à senestre (main gauche) la Porte Barbette. Tout ce biau (beau) cortège emprunte un tracé hautement célèbre : céans (ici) les éléphants d’avant notre âge venaient déjà boire en Seine par ce chemin, puis les Légions de Rome construiront un cardo et un decumanus (axe en croix) au sein de ce qui deviendra Paris, se nommant pour l’heure Lutèce, par la rue Saint Denis, célèbre pour ses Courreuses de Rempart (prostituées) le Grand Pont, le Palais du Roi sur la Grande Ile, le Petit Pont en direction de la Porte Saint Jacques au midi. L’autre axe de la croix longe la Seine entre lescastelleries du Louvre et la Tour de Nesle (laquelle deviendra célèbre pour ses coucheries royales), borde toutes les îles, regarde Notre Dame et sort au levant auprès du Chardonnet. Saint Denis en son temps remonta la rue qui porte son nom, sa tête sous le bras jusqu’au pui (colline) où se tiendra sa Basilique et où accessoirement seront inhumés la plupart des rois de France.
Mais je m’égare, moi, Frère Philippe du Temple, je regarde passer le cortège au cotés de mon Grand Maître Arnaud de Toroge, lequel vient de succéder à Eudes de Saint Amand, et nous devisons fraternellement en considérant que tout cette clicaille (monnaie) dépensée aurait pu nous aider bellement en Terre Sainte. Ne dit-on pas que moultes fonts (fontaines) donnent àbandon (à discrétion) du guiguet (vin médiocre) et que des vuiseuses (vicieuses) donzelles et bordelières (jeunes femmes) au poitrail esnué (dénudé) le fasset tombé (corsage) accueillent le badaud venus pour donoyer (faire la cour) et les baguenauds (niais) fatrouillant (bavarder à tort et à travers) et guignant (regarder à la dérobée) ces beaux tétins (seins)…
Bailler (donner) « Panem et circenses » (du Pain et des Jeux) rien ne change ce jour, ni ne changera l’autre…
Notre bon Roi se dirige vers le chantier de la belle Cathédrale de la Dameledeu (La Vierge Marie) pour ouïr Te Deum. Son Père posa quant à lui la première pierre de cette merveille il y a tout juste 17 ans. (Il me souvient que je vous ai déjà compté cette histoire ici même).
Quels sont les pensements (préoccupations) du jeune Roi ? Songe t’il sans déconfort (découragement) à l’Herpaille (troupe de coquins) qui l’attend par vilonie (félonie) de son « Bon Cousin » le Duc de Bourgogne, lequel attire dans son camp le Comte de Boulogne, Renaud de Damartin, ami et traître à Philippe, ce dernier le ramènera d’ailleurs en cage pour mourir enchartrer (en prison) par vindication (vengeance).
Icelui le Comte de Flandre et icelui même l’Empereur du Saint Empire Romain Germanique : l’éclatante victoire française de Bouvines est à venir, calmant pour longtemps tous ces coquins…
Pour l’heure Philippe pense en chiche face (avare) à ses finances : point de débours sur le Trésor (argent avancé), il pense mander (ordonner) que l’on taxe les boutedieux (Juifs) de 150.000 marcs hormis l’abjuration (changement de religion). Qui verrait à y redire, il serait même envisageable de les faire chasser du royaume (et de récolter leurs biens)…Un jour, un autre Philippe en fera de même avec notre Ordre, cela est force de choses…
Notre Roi songe à sa Descendance, il ne peut savoir qu’il fêtera trois Accordailles : avec Isabelle de Hainaut pour 10 ans, avec Ingeburge de Danemark, laquelle sera répudiée nonobstant son éclatante beauté blonde, dès la première nuitée par sans doutecharmement et charnogne (voir Yseult et Honorius pour le nouage d’aiguillette), il se mariera ensuite avec Agnès de Méranie, qu’il aimera de tout son cœur mais cela provoquera l’Interdit sur le Royaume (aucun service religieux) et ceci du fait du Pape Innocent III ; à la mort d’Agnès, Philippe se soumettra à l’Eglise, évitant ainsi le sort de son Ancesseur (ancêtre) Philippe Ier, mort excommunié et enterré en la basilique de Saint Benoît pour des motifs semblables.
Tout en cheminant, Philippe est fors déconfit (décontenancé) lorsque son flerement (odorat) ressent une assent (odeur) épouvantable : les rues ne sont jamais ébrenées (nettoyées), aussi, il pense à les faire paver. Il pense également à faire installer une forclose (palissade) au cimeterre des Saints Innocents où dit-on se passe nuitamment des choses inavouables. Cela permettrai ipso facto de construire une cohue (marché) nommé la Halle où l’on pourrai retrouver dans les éventaires (paniers d’osier) toutes les provendes de bouche dans une relative propreté.
Hors les grands axes, Paris est inextricable, il serait bon de pouvoir se retrouver et retrouver son chemin sans pour autant tomber au longaigne (cloaque) de la Cour des Miracles (voir article), aussi il faudrait clouficher (clouer) des enseignes aux gargoteset autreséchoppes, ainsi que des signes distinctifs pour les ruelles afin de savoir où l’on se trouve (actuelles plaques de rue).
Et la belle terre des Francs, il faudra en avoir son content (suffisamment)et la rassembler dans l’Honneur (domaine propre) : d’abord l’Artois, le Vendômois, Amiens et la riche Normandie après la chute du Château Gaillard (voir article) possession du « Cœur de Lion », puis la Touraine, l’Anjou, le Poitou…
Il songe, il songe : sera-t-il assez valeureux pour résister à tous ses ennemis Godon de l’Ouest (Anglais), du Nord avec la Flandre, de l’Est avec Bourgogne, et Germanie?
Quant à nous Chevaliers du Temple, nous pensons en grippeminaud (rusé) au repaissance (repas) du soir où nous pourrons nous ébanoyer (se divertir) lorsque nous aurons l’honneur d’offrir les Epices et de faire connaître à tous ces Grands Personnages le goût de la douceur orientale en faisant déguster moults gourmandises dont les recettes secrètes nous furent révélées par nos Ennemis et néanmoins Frères d’Armes : les Assassins du Vieux de la Montagne(voir article).
Il se peut que nous puissions, s’il plaît à Dieu, avec ces présents, persuader Philippe de nous suivre en Terre Sainte, et qui sait nul ne peut sortir ce que nousdeviendrons : faire la Paix avec le reste de la Chrétienté unie contre l’Infidèle…
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